Fonds Ludolf Schild

Jacqueline Robinson – dans son Aventure de la danse moderne en France (1920-1970) –comptait Ludolf Schild (1913-1949) parmi ces artistes venus d’ailleurs qui « implantés sur le sol français ont agi comme de riches fertilisateurs, voire comme des greffes ». L’associant à Jean Weidt et Heinz Finkel, autres pionniers de la « danse d’expression » venus d’Allemagne dans les années 1930, elle insiste sur « leur influence [qui] a été très grande ». Il serait bien difficile aujourd’hui de mesurer cette influence, s’agissant de Ludolf Schild, si on ne disposait du témoignage qu’en a laissé la journaliste et critique de danse Lise Brunel, laquelle fit partie du petit groupe de danseurs qui travaillèrent avec Schild au Studio 121 de la Salle Pleyel entre 1945 et 1948. Elle n’aura de cesse de rappeler ce qu’elle lui devait et combien elle le reconnaissait comme un « être d’exception »chez qui le langage corporel ne peut être dissocié de l’esprit et dont la danse « s’enraci[ne] très profondément dans chaque être, dans le sens d’une globalité physique, émotive et intellectuelle, avec quelque chose de sensible et de métaphysique » (Catalogue de la Biennale de la danse, Lyon, 1986).Le récent et précieux don au CN D par le fils de l’artiste, Michael Schild, des archives relatives à Ludolf conservées par sa famille, permettra aux chercheurs d’approfondir leur connaissance de cet artiste de la danse qui, s’il mourut jeune, connut un parcours fructueux, complexe et singulier, de Hambourg à Paris, puis Alger – alors un des trois « départements français d’Algérie » – et de nouveau à Paris. De nombreux documents (journal personnel, correspondance, photographies, articles de presse, programmes, affiches) vont pouvoir informer sur l’existence de l’homme, les récitals du danseur, les œuvres du chorégraphe – notamment Mystère (1941)et Tableaux d’une exposition (1941), Les Sept Figures de la vieille (1943) ou Don Quichotte (1945) –, sa place dans la vie culturelle algéroise puis dans le Paris d’après-guerre, sa compagnie Les Ballets français modernes, ou encore ses collaborations, particulièrement avec le dessinateur et costumier Jean Aubert. Mais c’est aussi sa formation à Hambourg, selon les principes de Laban et Wigman, puis la construction de sa propre pensée de la danse et plus largement de sa vision du monde et de la vie, et enfin tout son apport pédagogique – un enseignement « complet » et « très équilibré entre technique, théorie, relation à l’espace, rythme [et] créativité » (Lise Brunel) –, que l’on va pouvoir mieux étudier grâce à la présence dans ce fonds d’archives de nombreux écrits de Schild ou de danseurs et de témoins de son travail : notes personnelles ou théoriques, notes de chorégraphie, notes de cours ou d’improvisations, courriers et témoignages.