29.04 > 01.06.19
CN D Pantin
Nourriture et danse contemporaine
En 1932, Filippo Marinetti – l’initiateur du Manifeste futuriste de 1909 – publie La Cuisine futuriste. C’est le signe que les petits plats étaient rentrés dans l’art contemporain. Ils n’allaient plus en sortir à voir les orgies des actionnistes viennois ou les repas collés de Daniel Spoerri. La danse contemporaine mettra plus longtemps à intégrer les aliments dans ses préparations mais depuis trente ans la nourriture a pris sa place (non négligeable) dans les chorégraphies. Manger met à la fois en jeu un organe essentiel (la bouche) et une série de mouvements plus ou moins visibles (la manducation, le transit intestinal) que les chorégraphes peuvent vouloir traiter. Il est arrivé à l’un deux d’ingérer une caméra pour filmer de l’intérieur les mouvements intestinaux. Mais manger est aussi une activité multi-sensorielle, convoquant d’autres sens que l’œil qui domine notre culture. En mangeant, on peut sentir des saucisses qui cuisent comme Claudia Triozzi ou se transformer soi-même en tartine comme La Ribot. Manger est d’autre part une pratique sociale – comme le rappelle Alain Buffard en partageant mets et gestes avec Anna Halprin – qui permet de poser à travers le partage et la préparation des aliments un certain nombre de questions à la société où nous vivons. C’est ce que fait dès les années 1960 et 1970, pour ne prendre qu’un exemple, un certain nombre de femmes chorégraphes / artistes / écrivains : Lucinda Childs, Martha Rossler, Marguerite Duras ont utilisé les gestes de la cuisine pour interroger l’assignation des femmes à la cuisine quotidienne.
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