Composer, chorégraphier, dessiner : dans les archives de Lucinda Childs
Nouveau dossier

C’est en 2016 que la chorégraphe américaine Lucinda Childs fait don de ses archives au CN D qui prépare alors l’exposition Lucinda Childs: nothing personal 1963-1989, coréalisée avec la galerie Thaddaeus Ropac. L’importance et la richesse des archives de la chorégraphe, telles qu’elles apparaissent dans l’inventaire détaillé désormais en ligne (inventaire.cnd.fr), ont suscité l’envie de donner un accès facilité aux partitions chorégraphiques et autres documents graphiques du fonds. Ce dossier présente ainsi une sélection de ressources (dessins, diagrammes, croquis de parcours) liées à la composition des œuvres et essentielles pour leur compréhension. Y sont mis en lumière les structures générales des pièces, les procédés d’écriture, les outils géométriques et jeux mathématiques qui ont permis l’invention de sa danse. 

Cette pratique d’écriture de la chorégraphie est présente dès les premières années où Lucinda Childs se lance dans la composition de pièces au sein du Judson Dance Theater dans les années 1960. Elle prend alors la forme de simples croquis de parcours accompagnés parfois de textes (dits sur scène) ou d’autres documents de travail (plans ou listes). À partir des années 1970, la chorégraphe s’oriente vers la composition de mouvements quotidiens qu’elle chorégraphie dans le silence, de manière sérielle et répétitive. Elle élabore alors un matériau graphique plus complexe en créant de véritables partitions chorégraphiques. Certaines pièces donnent lieu à un diagramme à partir duquel, selon un processus sériel, la chorégraphe développe sa partition. La relation entre cette écriture géométrique et l’incarnation de la danse, à cette époque répétitive et minimaliste, s’impose comme une évidence. 

En 1979, Lucinda Childs crée Dance en collaboration avec le compositeur Philip Glass et l’artiste visuel Sol LeWitt et initie ainsi une série de collaborations artistiques. Pour la première fois, Lucinda Childs compose sa danse sur une musique et les structures musicale et chorégraphique se révèlent intimement liées. De grande envergure et présentant une diversité de formes, la partition est structurée en cinq par- ties, telle que fut présentée la pièce à la création. 

Depuis la fin des années 1980, Lucinda Childs utilise de plus en plus les pas et la technique classiques tout en conservant les dynamiques et les structures répétitives propres aux pièces des décennies précédentes. 

Sa pratique graphique, véritable outil de composition, subsiste. Les archives conservées au CN D offrent aujourd’hui une approche unique du travail et de la créativité de cette chorégraphe majeure qui affirmait dès 1979 que ce qui l’intéressait, « ce n’était pas la manière dont on exécute le mouvement mais la topographie de la danse » (in « La longue marche de Lucinda Childs », Marcelle Michel, Le Monde, 21 novembre 1979).